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La leptospirose

La leptospirose

Détails

Points essentiel :

-Les chiens attrapent la leptospirose directement, au contact de rongeurs, mais surtout indirectement, en buvant ou en se baignant dans des eaux douces contaminées par des urines de rat, (ou de ragondin, ou de chien…), porteur et excréteur de leptospires.

 

- La maladie se traduit essentiellement par une atteinte des reins (forte augmentation de l'urée et de la créatinine entraînant un abattement, des vomissements…), et du foie (entraînant une jaunisse…)

 

- Il est relativement aisé de tuer les leptospires avec des antibiotiques, mais l'atteinte des reins, et plus rarement du foie, peut s'avérer irréversible. Un chien a environ une chance sur deux de guérir de sa leptospirose.

 

- Le vaccin contre la leptospirose est inclus en routine dans tous les programmes de vaccination. Son efficacité est incomplète, mais il diminue tout de même le risque d'attraper la maladie, et de développer les formes les plus graves.

La leptospirose est une maladie infectieuse due à des leptospires. Il s'agit d'une maladie grave qui menace nos chiens, particulièrement ceux vivant à l'extérieur, mais peut aussi affecter l'Homme. 

Les leptospires peuvent persister très longtemps dans les reins d'une multitude d'animaux (toutes sortes de rongeurs, des chiens, des chevaux, des ruminants, des porcins…), avant d'être éliminées (disséminées) avec les urines de ces animaux. Elles vont se retrouver
dans les eaux de surface des lacs, des rivières et des mares, mais aussi dans les champs boueux, les flaques le long des chemins…

Les chiens se contaminent le plus souvent par l'intermédiaire de ces urines, en buvant ou en se baignant dans des flaques d'eau, ou dans un secteur d'eau stagnante dans une rivière, par exemple.  Il peut aussi y avoir contamination par contact direct avec un rongeur infecté. La majorité des cas est diagnostiquée entre juillet et décembre. Les chiens peuvent être atteints quel que soit leur âge. Les chiens de grande taille sont plus souvent infectés (probablement du fait d'un mode de vie plus rustique), et il y aurait une prédisposition du berger allemand à développer des formes de leptospirose plus sévères. 

LES SYMPTÔMES :

L'incubation est généralement de 4 à 12 jours, mais la maladie se déclare parfois deux 

jours seulement après la contamination. Certains chiens décèdent en quelques heures (forme suraiguë). Plus souvent, les premiers symptômes sont de la fièvre, de l'abattement, une baisse d'appétit, des douleurs articulaires ou musculaires, une gastro-entérite hémorragique, et/ou un jetage oculaire et nasal.

En quelques jours, une insuffisance rénale s'installe chez 80 à 90 % de ces chiens, se traduisant par des vomissements, de la déshydratation, parfois des douleurs dans la région des reins à cause de la néphrite, et aussi des ulcères ou une nécrose de la langue à cause de l'urémie. Dans les cas les plus sérieux, le chien n'émet plus du tout d'urine (anurie lors d'insuffisance rénale aiguë), mais dans les cas moins graves, on peut observer au contraire une soif et une quantité d'urine augmentées.

Un ictère (= jaunisse) se développe dans 20 % des cas, à cause d'une cholestase (= défaut d'écoulement de la bile), et/ou d'une nécrose du foie (coloration jaune de la peau du ventre (ci-dessus à gauche) et de la gencive (ci-contre à droite), chez un chien atteint de leptospirose).

De façon plus inconstante, on observe des hémorragies pulmonaires, une uvéite (= inflammation de l'intérieur de l'œil), une pneumonie. L'évolution peut se faire vers une hépatite ou une insuffisance rénale chroniques.

Enfin, certains chiens infectés peuvent ne présenter aucun symptôme - tout en excrétant des leptospires !

Repérer la Maladie :

On suspecte une leptospirose lorsqu'un chien, souvent jeune, ayant accès à l'extérieur avec la possibilité de boire dans les flaques, présente brusquement une maladie (fièvre, abattement important…) s'accompagnant d'une insuffisance rénale aiguë (urée et créatinine très augmentées), et parfois d'une insuffisance hépatique (ictère (photo de droite : même chien que ci-dessus), augmentation de la bilirubine et des enzymes hépatiques : PAL et ALAT). La présence d'une glucosurie (glucose dans les urines), traduisant une tubulopathie (atteinte des tubules rénaux), renforce la suspicion.

LE TRAITEMENT

L'élimination de la bactérie par les antibiotiques ne pose pas trop de problèmes : quinze jours de l'association amoxicilline-clavulanate pour détruire les leptospires en circulation, suivis par quinze jours de doxycycline pour atteindre les leptospires camouflées dans les tissus (notamment les tubules rénaux), et éviter l'évolution vers un portage chronique.

Le traitement de la maladie dans son ensemble est beaucoup plus compliqué : les reins (et le foie à un degré moindre), sont souvent gravement atteints, parfois irréversiblement détruits. Le chien est systématiquement placé sous perfusion (photo de gauche). Dans certains cas, urée et créatinine commencent à descendre au bout de quelques jours, témoignant de la guérison des reins. Dans d'autres cas, urée et créatinine ne baissent malheureusement pas, le chien n'urine pas malgré la perfusion de grandes quantités de liquides, et des œdèmes apparaissent. Le pronostic devient alors désespéré. Dans ces cas-là, seule une dialyse permettrait de gagner du temps et d'attendre une éventuelle guérison rénale, mais cet équipement très lourd n'est disponible que dans de très rares cliniques ou centres hospitaliers vétérinaires, ou écoles vétérinaires, en France.

Dans une étude récente portant sur 37 chiens atteints de leptospirose et traités à l'Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon, y compris par hémodialyse pour certains d'entre eux, 22 (59 %) ont été rendus à leurs propriétaires, tandis que 15 (40 %) sont décédés ou ont dû être euthanasiés. Trois chiens supplémentaires étant décédés au cours des mois suivant leur sortie, des suites de l'atteinte des reins ou du foie, on peut dire que la moitié des animaux sont morts de leptospirose, et qu'un chien a, grosso modo, une chance sur deux de se sortir de cette maladie.

LA PRÉVENTION

On peut évidemment essayer d'empêcher son chien de boire dans les flaques, mais ce n'est pas toujours évident. (Si l'on sait qu'un point d'eau stagnante est envahi de rongeurs, on peut tout au moins choisir un autre lieu de promenade).

Le vaccin contre la leptospirose est inclus dans les programmes de vaccination de routine du chien. Il se fait en deux injections la première année, (la première injection de préférence après l'âge de trois mois), suivies d'un rappel annuel.

 

Le vaccin contre la leptospirose est moins efficace que d'autres vaccins (par exemple, ceux contre la maladie de Carré et la parvovirose), et ce pour deux raisons : d'abord, sa durée d'action est relativement courte (une dizaine de mois), ce qui fait que les chiens les plus exposés (chiens militaires, chiens qui chassent au marais), pourraient recevoir trois injections de primovaccination au lieu de deux (toujours après l'âge de trois mois), et une injection de rappel tous les six mois, au lieu d'une fois par an. 

Par ailleurs, jusqu'à un passé récent, le vaccin n'incluait que deux "souches" de leptospires : Leptospira interrogans sérogroupe icterohaemorragiae, et Leptospira interrogans sérogroupe canicola, souches "historiques" qui n'étaient plus majoritaires aujourd'hui chez les chiens infectés. Or, il existe dans la nature plus de 250 sérovars pathogènes, répartis en 24 sérogroupes, dont 10 (sérogroupes) sont d'importance reconnue chez le chien ! Depuis la fin des années 2010, la plupart des vaccins, désignés sous l'appellation L4, intègrent deux autres souches : Leptospira interrogans sérogroupe Australis, actuellement très largement majoritaire chez les chiens infectés, et Leptospira kirschneri sérogroupe Grippotyphosa. Il semblerait en outre que le vaccin assure un certain degré d'immunité croisée vis à vis d'autres sérovars.

 

Ainsi, même si ce vaccin ne protège toujours pas à 100 %, son efficacité s'est largement améliorée avec l'arrivée des L4, diminuant le risque d'attraper la maladie, et de développer les formes les plus graves.

ET QUELS RISQUE POUR L'HOMME ?

La leptospirose est une zoonose. Selon l'OMS, il y aurait entre 320 000 et 500 000 cas humains dans le monde, chaque année (études de 2008), dont 10 % décèdent. La France métropolitaine a le taux d'incidence le plus élevé d'Europe, avec cependant 342 cas "seulement" en 2008, et 197 en 2009. Le sérogroupe Icterohaemorrhagiae, agent des formes les plus graves de la maladie, représente 25 à 30 % des cas.

 

L'Homme se contamine lorsque l'une de ses muqueuses (nez, bouche, œil), ou la peau (de préférence une plaie), se trouve au contact des sécrétions d'un animal infecté. Une morsure de rongeur marche très bien aussi ! C'est avant tout une maladie des égouttiers, qui travaillent dans des eaux stagnantes où ont uriné des rongeurs infectés - et peuvent aussi se faire mordre par ces derniers. Mais de nombreuses contaminations humaines font tout simplement suite à une baignade en eau douce, à la pêche ou au canotage. En 1998, 11 % des 834 athlètes qui participèrent au triathlon de Springfield, Illinois, attrapèrent la leptospirose en nageant dans le lac local !

Comme pour le chien, ill s'agit d'une maladie grave, pouvant se traduire par un syndrome ictéro-hémorragique ("jaunisse" associée à des troubles hémorragiques), ou plus rarement par une méningite, des troubles pulmonaires, une insuffisance rénale chronique, ou une septicémie.

En cas de suspicion de leptospirose chez un chien, les propriétaires (et le personnel soignant) devront donc prendre des précautions lorsqu'ils manipulent l'animal, et particulièrement ses urines : port de gants, lavage des mains après toute manipulation, désinfection à l'eau de javel des endroits où le chien s'est couché ou a uriné…

Les rongeurs de compagnie ne devront pas être achetés n'importe où, et il sera prudent de ne pas les laisser vagabonder en liberté sur les pelouses ou près des points d'eau où des rongeurs sauvages ont pu laisser leurs déjections… et leurs leptospires !